J'avais decidé d'aller faire un tour en ville et je me retrouve à arpenter les allées du cimetière. Je vais aller dire bonjour à Abuelito, ai-je pensé, il fait beau, c'est un bon jour pour aller le voir.
Julio Arguello 30.7.1932 26.5.2000. Les fleurs sont fausses, deux plaques sont sur la tombe : la notre, ses petits enfants, un pêcheur, oui parce qu'il aimait pêcher et l'autre, "à notre voisin". Un pot rempli de pierres est à côté des fleurs, je ne sais pas ce qu'il veut dire mais j'y mets tout de même une pierre. Les larmes coulent toute seule, il me manque... Je lui fais un sourire et pars visiter les autres.
Je passe au millieu des tombes et imagine les personnes à leurs places : l'homme au chapeau haute forme, celui-là plutôt melon, une vieille femme un peu ratatinée mais à l'air bon. Ma main effleure leur tombe comme si elle se posait amicalement sur les bras ou les épaules de ces personnes, comme une grande réunion de famille où je saluerais tout le monde de ce simple geste. Je regarde les noms, les dates, les personnes nés dans les années 1800 et mortes en 1900 me fascinent, puis je me retourne et vois mon nom. Je contourne la tombe et m'arrête devant.
Fanny Laugel 15.09.1928 30.111961. Trente trois ans, elle était jeune. Ca me trouble un peu de voir mon nom ici, j'ai de la tendresse pour cette femme morte trop tôt qui portait le même prénom que moi. Je lui dis au revoir et continue ma visite. J'évite les tombes fraîches, avril de cette année vois-je sur une de ces croix en bois, janvier sur une autre. Encore trop tôt pour que je m'en approche, j'ai peur de déranger. Je vois une croix en fer blanc assez loin, je m'en approche. Une statuette est posée devant elle, un angelot souriant dans une fleur, mes yeux remontent le long de la croix.
Bents Caroline 9.3.1974 15.5.1976, deux ans, deux mois et 6 jours...
Le soleil tape fort, je m'installe contre la tombe de la famille Walter à l'ombre d'un arbre, face à moi, les familles Kayser-Renoux et Bertsch-Wolf-Frischertz. Je pose ma dernière ligne sur ce ticket de caisse qui me sert de cahier à pensées pour cette après-midi. J'irai dire au revoir à mon grand-père avant de partir et pour toute ces âmes, je verserai une larme sous ce beau soleil de juillet.
J'ai écrit un mot et je l'ai caché sous la plaque du pêcheur
Tu me manques
Te quiero Abuelito
Fanny
Parole de Poète Disparu