[VI]
La dispute
- Attend là. Dit-elle en me faisant asseoir sur son lit. Il n’y avait pas d’expression spéciale sur son visage, pas de ton particulier à sa voix. Elle m’avait dit « attend là » comme elle aurait pu me dire « tu veux du thé ? ». Il y avait peut-être un peu de regret dans ses yeux mais ce n’était pas aussi visible que toutes ces fois précédentes où ses yeux, à l’instar de sa bouche, m’avaient demandé pardon. Elle était fière, ma blonde, les pardons étaient murmurés avec elle, jamais formulés.
Je parlais déjà d’elle au passé, j’en rejetai aussitôt la faute sur une amie que j’avais vue peu avant et qui jurait sur sa vie qu’après cette dispute c’était finit entre elle et moi. Mais elle était fière ma blonde, fière et forte, ce n’était pas si peu de chose qui pourrait la faire craquer. Et puis… Elle tenait à moi.
Assise sur son lit, je me trouvai encore à penser au pire, elle en rirait si elle avait été là. Mon regard se perdit dans la pièce. Cette chambre, là où tout avait commencé. Les murs étaient recouverts d’une patine crème, presque blanche, la seule armoire, le seul chevet étaient de cette même couleur, ils se confondaient aux murs et finissaient par disparaître, ne laissant dans cette chambre qu’une présence à ce lit aux couvertures blanches mais au sommier noir. La fenêtre n’était pas ouverte mais je sentais comme un air frais autour de moi. La “vie” dans cette pièce fut toujours si agréable que revenir ici me donnais toujours l’impression d’être dans un autre monde. Je savais que mon amie avait tort, nous n’étions pas là pour rompre. Dans un film ou un roman, ç’eut été sûrement le bon endroit, comme le mal naissant de la pureté, mais dans ce paradis qui fut le nôtre, cette histoire ne pouvait déchoir. Je savais que ma blonde ne voudrait pas salir cette mémoire malgré toutes les stupides disputes du monde. Pourquoi étais-je ici alors ? Je posais mes yeux sur le voile blanc devant la fenêtre, pourquoi me tracasser, j’aurai mes réponses bientôt, il ne lui faudrait sans doute que quelques minutes pour revenir. Où était-elle parti déjà ? Cuisine ou salle de bain ? Je n’avais pas bien regardé, j’étais déjà trop préoccupé à imaginer le pire. Et depuis combien de temps était-elle parti ? Dans l’univers mystique de sa chambre où pas même une surbrillance électrique n’indiquait l’heure, je n’arrivais plus à savoir si j’étais là depuis dix minutes ou trois jours. Mes yeux se fixèrent sur un bout d ‘étoffe brune dépassant de son armoire. Tient, que portait-elle ? J’entendis soudainement du tissu se froisser à la porte de sa chambre. Elle portait une robe de chambre de satin rouge, je m’en souvenais maintenant, celle-ci venait de glisser le long de ses épaules, puis ses bras pour venir caresser le sol.
Mon cœur ne battait plus.
Rouge et noir étaient mes couleurs favorites mais je soutenais que c’était des couleurs de brunes. Ne l’avais-je jamais vu avec ces couleurs, ma blonde ?
Un corsage rouge cousu de dentelles noires rehaussant sa poitrine en deux magnifiques collines, sa taille marquée appelait mes mains à combler le creux au-dessus de ses hanches. Porte jarretelles et bas, noirs et à dentelles tous les deux et petite culotte assortie au corsage… Que dire de plus ?
Elle me regardait presque innocemment, comme une vierge qui va se donner à une inconnue, excitée par la curiosité mais ne sachant pas vraiment ce qui va se passer. Elle s’avança vers moi, le regard décidé puis s’arrêta à un pas de moi.
- Tu aimes ? Me demanda-t-elle avec un sourire espiègle. J’hochai la tête de haut en bas pour répondre. Je me faisais l’effet d’un puceau voyant pour la première fois une femme nue. Elle se baissa lentement, faisant passer ses seins à quelque centimètre de mes lèvres qui rêvaient de s’y agripper, elle attrapa mes mains et me fit me lever. Elle accrocha mon regard de ses yeux fiers et plaça mes mains là où elles devaient être : dans ce creux au-dessus de ses hanches. Que voulait-elle que je fasse, que je lui enlève son corsage ou que j’en profite ? Elle dégagea les cheveux de son épaule gauche en fermant les yeux, c’était son signe, elle s’offrait à moi. D’un geste brusque, je collai nos deux corps, un second sourire se forma sur ses lèvres décidées il y avait encore quelques secondes à ne plus me montrer aucune émotion. Elle voulait jouer à la dominatrice, mais ce n’était jamais très sérieux, c’était des regards ou quelques gestes brusques, juste assez pour attiser. Elle remonta lentement ses mains jusqu’à ses cheveux qu’elle attrapa et garda en chignon désordonné, laissant alors son corps tout entier à ma merci. Je fis glisser mes doigts le long de son corsage, c’était une étrange sensation que d’avoir les mains sur ce tissu rigide et de sentir tout de même le corps frémir en dessous. Plus mes mains montaient, plus ma tête basculait en avant ; mes lèvres n’avaient pas oublié la tentation d’avant, elles voulaient conquérir, elles auraient ces seins ! Ce fut pourtant ma langue qui fit trembler les collines en premier, qui se délecta de la douceur et de cette odeur particulière à ma blonde. Mes mains glissèrent de la rigidité du corsage à la souplesse des jarretelles et à la douceur de la culotte, j’adorais ses fesses fermes. Sa poitrine se gonflait et s’affaissait au rythme des allées et venues de mes mains qui parcouraient tout son corsage puis ses fesses et de ma langue qui caressait toutes les zones de ses seins à son cou. Je la sentais fébrile, il fallait que je la sauve de ce ravissant corsage qui la faisait rosire, mais avant cela, il fallait que je la fasse mourir au moins une fois. J’étais la dominatrice maintenant, la chandelle passait de l’une à l’autre, nous n’avions pas de règles la dessus. D’un second geste brusque, je resserrai mon étreinte et d’un même geste mes lèvres emprisonnèrent les siennes. Elle gémit par trois fois dans le baiser fougueux que je lui infligeai, j’avais gagné, je pouvais enfin la sauver. Mes mains attrapèrent les quatre cordons dans son dos et tirèrent.
Quand elle fut libérée de sa prison satinée, elle entreprit de me déshabiller entièrement et n’éprouva aucune difficulté à le faire car j’étais comme un pantin sous ses doigts. Mes habits volèrent dans tous les sens, si elle avait pu, elle me les aurait arrachés, elle était d’humeur bestiale. Une fois que mes habits étalés dans toute la chambre, formant des taches de couleur dans cette pièce presque entièrement blanche, je posai à nouveau mes mains sur ses hanches et je me rendis compte du fin stratagème qu’elle avait mis en place : lorsque que j’entreprendrais de retirer ce fin tissu rouge qui recouvrait son intimité, j’aurai beau le faire de toutes les manières possibles, ses jarretelles et ses bas, ne bougeraient pas. Je me mis à sourire à cette constatation, elle me vit et étouffa un rire. J’allais lui dire que j’étais impressionnée par l’ingéniosité de ce détail, mais elle ne me laissa même pas ouvrir la bouche, elle me sauta dessus presque littéralement et se retrouva couchée à plat ventre sur moi. Elle plaça ses mains sous mes épaules et sa tête plongea dans le creux de mon cou, tout près de mon oreille. Mes mains qui effleuraient son dos faisaient onduler son corps sur le mien, des frissons provoquaient des spasmes de ses muscles et me faisaient frémir à mon tour. J’adorais quand elle étalait tout son corps sur le mien, j’avais cette impression étrange que nous fusionnions.
- Pardonne-moi pour hier. Murmura-t-elle.
Que s’était-il passé hier ? Me demandai-je alors que sa langue s’approchait dangereusement de mon oreille. Et puis d’abord, c’était quand hier ?